La transformation d’une mutante avec l’aide de la chef maquilleuse de Phénix noir
Phénix noir est le dernier né de la franchise X-Men, dont le premier film remonte à il y a près de 20 ans. En éliminant X-Men du titre de l’œuvre, le coscénariste/réalisateur Simon Kinberg, un des créatifs les plus chevronnés de la franchise, a résolument braqué les projecteurs sur Jean Grey (Sophie Turner). Le film porte sur une mission de sauvetage dans l’espace qui tourne horriblement mal ainsi que sur la transformation subséquente de Jean Grey, qui était déjà une membre puissante des X-Men, en la force cosmique aux pouvoirs inimaginables qui donne son titre au film. Quand Jean Grey se déchaîne, même Magnéto (Michael Fassbender) en tremble.
Travailler sur cette vénérable franchise veut dire que vous avez beaucoup de points de référence avec les premiers films de la série, mais il faut que chaque nouvel épisode amène l’histoire et les personnages en territoire inconnu. Pour la chef maquilleuse Annick Chartier, cela voulait dire trouver moyen de faire preuve de créativité à l’intérieur des paramètres définis de personnages bien connus. « Il y a un double défi », explique la maquilleuse. « Quand tu abordes une chose qui a déjà une histoire, il est important que tu puisses laisser ta marque sans compromettre les personnages. J’ai adoré travailler avec Simon [Kinberg], il a été merveilleux et très accessible et très ouvert aussi. Il m’a imposé certains paramètres, mais il m’a laissée libre d’explorer et m’a permis de lui montrer ce que j’avais en tête. Au point de vue créatif, c’était très agréable. C’était un processus très positif et très harmonieux.
Le personnage le plus important du film, celui de Jean Grey, a également été celui à l’égard duquel la maquilleuse avait le plus de latitude. Vu que Phénix noir porte sur la transformation du personnage en ce que l’on pourrait raisonnablement appeler une déesse de la mort, Annick Chartier s’est efforcée de maintenir un lien avec les versions antérieures du rôle (interprété pour la première fois par Sophie Turner en 2016 dans X-Men: Apocalypse) pendant qu’elle la transformait en Phénix noir.
« Dans le dernier film, Jean avait un look plus ingénu avec les cheveux tirés vers l’arrière et un peu de noir autour des yeux, mais, pour Phénix noir, je voulais qu’elle ait un air plus femme », explique la maquilleuse. « Mais il fallait aussi que le look de Jean s’harmonise avec celui de Tye Sheridan dans le rôle de Cyclope, son petit ami. Je ne voulais pas qu’ils aient l’air de ne pas être faits l’un pour l’autre. Je pense que Simon a vraiment bon goût. Il préfère un look plus naturel. Pas de faux cils ou de choses du genre. »
Sophie Turner apporte non seulement ses talents d’actrice au film, mais aussi la couleur naturelle de ses cheveux et de ses yeux, un cadeau pour une maquilleuse expérimentée. « On accorde beaucoup d’importance à ses yeux dans ce film, il s’y passe des tas de choses, donc il était très important qu’ils soient spectaculaires » affirme-t-elle. « Sophie a de beaux traits, et il suffit de peu pour les faire ressortir. Je suis restée en harmonie avec la couleur de ses cheveux—tons roux et blonds—donc tout s’agence sans trop ressortir. Son ombre paupières reprend les tons de ses cheveux, et puisqu’ils sont roux, j’ai utilisé des tons d’ocre et de brun orangé. »
Compte tenu de la gamme d’émotions fortes que l’actrice devait exprimer dans son rôle, Annick Chartier devait également s’assurer que son maquillage puisse résister aux rigueurs des larmes, des cris et de toute une série d’autres émotions. La transformation de Jean a des manifestations physiques qui sautent aux yeux (et sont principalement dues à un système de génération d’images par ordinateur). Des veines lumineuses parcourent son visage. Ses yeux verts s’éclairent d’une lumière surnaturelle. C’est sur son visage que la transformation de Jean en Phénix noir se remarque surtout. La maquilleuse devait refléter avec précision chaque permutation.
« Il faut tenir compte du fait que ces personnages doivent passer par toute une gamme d’émotions et que tout doit rester en place », explique la maquilleuse. « J’utilise des poudres pour m’assurer que rien ne bougera. Il faut que tout soit étanche. Si tu n’utilises pas de produits liquides, rien ne coulera. Ça pourra pâlir un peu, mais il fallait que je choisisse des produits qui allaient rester en place. Dans l’ensemble, je suis très contente du résultat. Le maquillage de Sophie n’a pas bronché. Pour certains acteurs, je dois dire, c’est quelque chose qui exige plus d’entretien. Pour Sophie, c’est incroyable. Cette fille est la perfection. »
Jean Grey n’était pas le seul personnage dont on avait demandé à Annick Chartier de modifier légèrement le look. « J’ai modifié le maquillage des yeux de Tornade (Alexandra Shipp) dans Phénix noir, et aussi ses yeux comparativement à ce qu’elle portait précédemment dans Apocalypse », explique la maquilleuse. « Elle a des cheveux courts qui lui donnent une apparence forte et dynamique. Je ne voulais pas lui donner de lèvres parce que je voulais attirer l’attention sur ses yeux et la structure de son visage. Il y a beaucoup de gros plans dans ce film. Il faut aussi que tu fasses attention au rouge à lèvres : s’il ne s’harmonise pas avec le reste du visage, surtout pour un personnage comme Tornade avec toutes ces scènes d’action, ça pourrait devenir un problème. Amanda me demandait souvent de lui faire des lèvres, mais je lui répondais non, ma chérie, tu es magnifique [rire]. »
Côté hommes, le célèbre crâne reluisant de James McAvoy dans le rôle du professeur X a exigé beaucoup d’entretien. Annick Chartier a élaboré ses propres recettes pour le maquillage de McAvoy. « Le professeur X est chauve, mais James de l’est pas », précise-t-elle. « Si tu rases complètement quelqu’un qui a des cheveux, son cuir chevelu prend un ton bleuté. Il faisait parfois extrêmement chaud pendant le tournage. Donc tu commences avec une couleur le matin pour qu’il y ait continuité. L’acteur s’engage ensuite dans une scène très physique ou exigeante, puis son métabolisme fait des siennes, il se met à transpirer, il rougit, et puisque que ce qu’il a sur la tête n’est pas sa propre peau, son visage et ses joues rougissent sans que le dessus de sa tête change de couleur, donc il faut ajuster la couleur du cuir chevelu à mesure que la scène se déroule. C’est beaucoup de travail pour tout le monde. Il a fallu qu’on le rase quotidiennement et qu’on maintienne la santé de son cuir chevelu. »
Un des aspects du travail d’Annick Chartier qui passe le plus souvent inaperçu est l’étroitesse de la collaboration qu’elle apporte aux acteurs durant tout le tournage d’un film en tâchant de rester plus ou moins invisible. Sa longue carrière l’a rendue capable de murmurer à l’oreille des acteurs. Elle a également fait partie de l’équipe de X-Men: Days of Future Past, film tourné à Montréal, la ville où elle habite.
« Il faut que tu fasses tout ce travail sans déranger ni interrompre le flux des émotions des acteurs parce qu’ils ont un travail à accomplir », précise-t-elle. « Mon travail à moi est de leur donner le visage de l’emploi et de le faire le plus rapidement possible avec un minimum de dérangement. Je commence par gagner la confiance de l’acteur ou de l’actrice. Ça se fait plus ou moins silencieusement. C’est un peu difficile à décrire, mais tu dois faire les choses efficacement, discrètement. Il faut s’effacer. Ils ont un travail à faire, et moi aussi. Tu es sur un plateau de cinéma, et ce qui se passe devant la caméra est ce qui t’amène sur les lieux. Ça n’a rien à voir avec toi, avec ta vie ou avec la blague que tu voudrais raconter à un acteur. Nous sommes tous là pour raconter la même histoire. C’est une chose qu’on doit reconnaître en se présentant sur le plateau. Tu dois aimer les acteurs, tu dois aimer le cinéma et le respecter. »
Phénix noir sort en salle le vendredi 7 juin.
*Par Bryan Abrams (en anglais) via The Credits*